Alexandre Del Valle : La Stratégie de l’Intimidation, du « terrorisme jihadiste à l’islamiquement co
A l’occasion de son dernier livre La Stratégie de l’Intimidation, Europe Israël a rencontré Alexandre Del Valle, géopolitologue, consultant et Essayiste, spécialiste de l’Islam et du Moyen Orient.
Un entretien passionnant en 3 épisodes.
Entretien réalisé par Jean-Marc Moskowicz

Europe Israël : Dans votre dernier livre La Stratégie de l’Intimidation, vous parlez du « terrorisme jihadiste à l’islamiquement correct » (sous-titre du livre). Pouvez vous développer ce concept d’islamiquement correct ?
Alexandre Del Valle : L’islamiquement correct est la déclinaison islamophile du politiquement correct, qui consiste à victimiser les musulmans au point que ceux ci sont devenus un « bloc du bien sans tâche et intouchable » et ne peuvent donc être accusés de rien ni sommés de remettre en questions les travers de leur religion et de leurs coreligionnaires, y compris terroristes, qui n’auraient « rien à voir avec l’islam »… Lorsque toute critique de l’Islam – même rationnelle – ainsi que toute critique de l’islamisme sont assimilés de façon fallacieuse à un racisme envers les musulmans (comme s’il y avait un « chromosome musulman), nous ne sommes plus dans la défense de « victimes » face au racisme mais nous cautionnons ce que j’ai nommé le « suprémacisme islamiste », réfractaire à toute autocritique, ce qui est la base de tous les totalitarismes ou idéologies conquérantes.
J’ajoute que si le politiquement correct consiste au départ à « protéger » par toute une taxinomie les minorités supposément victimes, l’islamiquement correct ou la lutte contre l’islamophobie qui est son cœur avec l’islamophilie béate, revient à faire des musulmans les victimes « absolues » qui détrônent toutes les autres, y compris les puissants lobbies féministes ou homosexuels, littéralement « déclassés » par la xénophilie pro-islamique.
Cette victimologie centrale de l’islam et des musulmans vus comme un bloc intouchable et exonéré de critiques est si puissante qu’une féministe de gauche comme Rokala Dialo en est à défendre le voile islamique au nom de la dignité des femmes, dont la défense de la liberté est détrônée par le soi-disant « droit à la différence » de la communauté musulmane, or quand on fait des concessions à des groupes pris en bloc, cela ne peut que se faire au détriment des individus membres de ce bloc assignés à communauté.
La démographe Michel Tribalat a bien démontré que la victimologie islamique a détrôné la défense des femmes. L’islamiquement correct consiste à couvrir, cautionner l’islamisme radical sous couvert d’antiracisme, ce qui est une incroyable confusion entre les personnes et les textes puis une subversion de la tolérance au profit de ses ennemis déclarés… Cette subversion de l’antiracisme par le suprémacisme islamiste anti-occidental allié aux tiersmondistes de gauche tout aussi haineux de ce que nous sommes explique pourquoi la plupart des organisations antiracistes actuelles défendent le voile et le communautarisme islamiste qui est en train de gangréner nos sociétés. C’est ainsi que le président Erdogan qualifie habilement depuis des années le « droit des femmes à porter le voile » comme le « premier des droits humains »…
La deuxième dimension de l’islamiquement correct réside dans une vision de l’histoire déformée, manipulée, subvertie, à commencer par l’histoire de l’Occident, coupable de tous les maux de la terre et surtout des victimes du monde musulman agréssés par les croisades, la Reconquista et la colonisation, puis celle du monde arabo-musulman paré de toutes les vertus morales, scientifiques et philosophiques et bien « tolérant par nature ». Cette autre dimension de l’islamiquement correct, traitée longuement dans la deuxième partie de mon livre, passe par le postulat selon lequel l’Occident dans son ensemble serait « redevable » envers l’Islam, la science et la philosophie des musulmans, et bien sûr les Arabes qui nous auraient « civilisés » puisque sans leurs « traductions » et apports scientifiques, nous serions restés dans les ténèbres du Moyen-Age et de l’Inquisition. Je démontre preuves à l’appui dans mon livre que cette vision manichéenne et ethno-masochiste de notre civilisation est historiquement un « fake » énorme que l’on enseigne pourtant depuis quelques années dans toutes les écoles et universités et que l’on diffuse dans les médias, les programmes télé et les discours des dirigeants soumis aux lobbies islamistes. L’idée est que l’Occident ne serait devenu intelligent, développé et scientifique que « grâce » aux Arabes/musulmans avec « leur » zéro et leur philosophie, et que face à « notre » intrinsèque intolérance, la tolérance admirable des arabo-musulmans en Andalousie et à Bagdad ou des Turcs sous l’empire Ottoman serait inégalée…
Europe Israël : D’ailleurs, l’Islam s’est appropriée des penseurs Juifs tel que Maimonide.
Alexandre Del Valle : oui, or Maïmonide fut converti de force dans la soi-disante « Espagne islamique et arabe tolérante », Al-Andalous. Il dut même fuir la belle Andalousie arabe mythifiée par tant de chrétiens et juifs naïfs pour trouver refuge au Maroc puis en Egypte, alors bien plus tolérants avec les Juifs que Al-Andalous ! il précise même dans les écrits que nous avons sur lui ou de lui, en des termes proches de ceux-ci : « Notre sort sous l’Islam était terrible. Aucun peuple n’a autant persécuté les Juifs que les Musulmans ». C’était bien sûr avant l’Inquisition et la Shoah ».
On nous explique à longueur de cours islamiquement corrects que « Sans les Arabes et les Musulmans » nous n’aurions donc ni le zéro, ni Aristote, ni les mathématiques, ni l’algèbre, mais nous n’aurions pas non plus connu notre propre Renaissance et notre Modernité qui ne seraient que le fruit de la « philosophie » traduite par les sages Arabes et musulmans… Or je démontre dans la deuxième partie de mon livrequ’aucun de ces grands scientifiques n’était « arabe », que peu étaient des musulmans, souvent d’ailleurs persécutés pour hérésie, et que leur philosophie grecque fut traduite en Arabe par les Chrétiens araméophobes soumis par eux et que le zéro leur a été transmis par les Indiens via les Perses. Je dresse d’ailleurs la liste de tous les soi-disant « savants musulmans-arabes » d’Andalous, de Bagdad, de Damas, dont aucun n’était réellement arabe et aucun de bons musulmans. Au Proche-Orient, la plupart était des Chrétiens hellénisés, des Perses, des Juifs comme Rambam et surtout des Syriaques-Araméens, et en Andalousie et au Maghreb ils étaient chrétiens, juifs et musulmans condamnés par le clergé islamique qui en persécuta et tua plus d’un.
Europe Israël : ceci explique l’ouverture au Musée du Louvre d’une section dédiée à l’art islamique
Alexandre Del Valle : Justement je parle dans mon livre de cette section au Musée du Louvre. On présente comme « art islamique » des œuvres chrétiennes, perses, zoroastriennes, de peuples autochtones pré-musulmans qui ne doivent à rien à l’Islam ! Une véritable falsification historique au profit des lobbies panislamistes mondiaux très actifs en Occident et alliés aux forces de l’autoflagellation occidentale de gauche ou cosmopolitiquement correctes… En réalité les plus grands islamologues et historiens savent que l’Islam ne devint une grande civilisation non pas grâce aux féroces guerriers (leur mérite militaire est indéniable mais assorti de leur ruse de guerre) arabes illettrés venus du désert d’Arabie mais au contact des savants des civilisations hélléniques, syriaque-araméennes, juives et perses pré-islamiques conquises par les cavaliers musulmans. On a ainsi renversé les faits historiques, car ce sont les arabo-musulmans qui devraient remercier les autochtones grecs, les Juifs et les Perses pour les avoir instruits quand les musulmans n’étaient pas encore trop obscurantistes et non l’inverse, car si l’islam fut une civilisation avancée, ce fut grâce à ces autochtones non musulmans et non-arabes et malgré l’islam, qui les persécuta dès le X ème siècle, plutôt que « grâce » à l’islam…
L’islamiquement correct consiste de ce fait à s’accaparer, à « capter », comme le dit Bat Yé’or, les apports des peuples non-musulmans/non-arabes conquis. Et le vrai génie de l’islamisme consiste à combattre depuis des siècles le progrès scientifique, la Raison et la philosophie tout en faisant croire que tous les acquis du Moyen Orient, des civilisations perses, juives, byzantines, assyro-chaldéennes, toutes ces grandes civilisations de l’Orient devraient leur science, sont à mettre à leur crédit. Ce tour de passe-passe est extraordinaire quand on sait que depuis que le dogme de l’islam sunnite a été fixé, codifié et définitivement fixé, au Xème siècle (« fermeture des portes de l’Ijtihad), l’islam et le monde arabo-musulmans ont persécuté systématiquement les scientifiques et philosophes de sortes que jusqu’à aujourd’hui, la philosophie est interdite dans l’islam orthodoxe, qui la qualifie d’innovation blamâble » (bidaa).
Europe Israël : On construit une imposture à l’échelle européenne de la même manière que l’on a construit l’imposture du peuple palestinien.
Alexandre Del Valle : Exactement et c’est très grave. Dans mon livre, j’explique que vanter le califat islamique de Bagdad et de Damas, les Omeyades et les Abbassides, ou encore vanter l’empire califal et sultanat ottoman envers lesquels nous aurions contacté une « dette » civilisationnelle éternelle, ce « fake », vise à rendre l’Europe inférieure à un Orient islamique supposé plus vertueux moralement (mythe de la « tolérance musulmane) et scientifiquement supérieure (« science arabo-islamique »), revient à faire le jeu des islamistes suprémacistes qui justifient tous leur projet d’islamiser l’Occident par cette soi-disant « supériorité islamique » et par notre culpabilité ou « dette » envers une civilisation qui domina une partie de l’Europe et dont des régions entières (Sicile, Balkans, Andalousie) « appartiendraient » encore moralement à l’islam qui en aurait été chassé par de condamnables croisades et reconquêtes… N’oublions jamais que le mythe de la « récupération des territoires perdus du Califat » est aussi le thème mobilisateur central des Jihadistes d’Al-Qaïda et Daesh. Ce mythe irrédentiste est très dangereux, et ceux qui en l’alimentent chez nos « intellectuels » repentants et tiersmondistes islamophiles en vantant les merveilles des Califats de Damas, Bagdad, de Cordoue ou d’Istanbul font le lit du suprématisme islamique et des Jihadistes. Ils font d’ailleurs également leur jeu lorsqu’ils fustigent le supposée « islamophobie » occidentale, européenne, française après chaque attentat islamiste car la « paranoïsation » des musulmans par la lutte contre l’islamophobie est commune aux professionnels du nouvel antiracisme néo-gauchiste, aux islamistes « institutionnels » (lobbies officiels et Etat islamiques membres de l’Organisation de la Conférence islamique, Frères musulmans, Ligue islamique mondiale, ISESCO, etc) et aux Jihadistes. Tout cela repose sur une mystification totale, une « guerre des représentations » comme nous disons en géopolitique.
Il ne faut que nous prenions conscience qu’il s’agit là d’une guerre subversive et psychologique qui nous est menée magistralement depuis des décennies par les lobbies islamistes irrédentistes et totalitaires qui présentent l’islamisation (en cours ) de l’Europe comme une « juste rétribution » de ses prétendus « apports historiques » et comme une « expiation de nos « fautes colonialistes passées », ce qui est fort du café de la part de la civilisation la plus fière de son impérialisme et de la part des adeptes de la Charià qui affichent clairement leur objectif de conquérir-dominer-soumettre l’Humanité toute entière de gré (« jihad du verbe ») ou de force (jihad guerrier)… De ce point de vue, si l’Europe qui ne cesse de s’excuser auprès des peuples musulmans jadis colonisés par elle, il est « normal » que cette Europe accompagne, permettre, favorise sa propre islamisation-rédemption post-coloniale sur son propre sol… La conquête de l’Europe ne serait ainsi qu’un « juste retour des choses » selon la doctrine islamiste, puisque l’Europe serait redevable et ingrate en vers les Arabes et l’Islam, quoi que cette idée de nous faire « pardonner » notre « islamophobie » et notre colonisation passée par l’immigration islamique massive même illégale et par la promotion de l’islamisme est partagée par nombre de groupes, partis et personnalités d’extrême-gauche et tiersmondistes qui vomissent tout ce que représente la cvilisation occidentale capitaliste, bourgeoise, judéo-chrétienne et européenne…
Je citerai un seul exemple de la centralité du thèmes des pays musulmans d’Europe anciennement dominés par les Arabes et le Califat et qui auraient été « injustement » reconquis et christianisés par les Européens et que l’islam aurait le « droit de « reprendre » (ce que pensent de très nombreux musulmans) : Abdullah Azzam, le mentor de Ben Laden, qui a co-créa Al Qaïda, a écrit un livre très lu et célèbre dans la mouvance islamiste-jihadiste : « La récupération des territoires perdus de l’Islam ». Dans son livre, il affirme que la première nation qu’il faudra récupérer c’est l’Espagne, et que tout territoire jadis musulman (Dar al-Islam) : Xinjang chinois, Inde, Israël, Sicile, Balkans, Arménie, Grèce, etc – jadis dominé par les califats arabes, turc-ottomans ou autres dominateurs islamiques devra « revenir » tôt ou tard à l’islam, car ce sont des « terres islamiques » occupées par les « mécréants »… Ainsi, quand les Européens vantent le mythe de l’Andalousie arabo-musulmane, c’est extrêmement dangereux car ils alimentent le mythe irrédentiste central du djihadisme qui a d’ailleurs servi à revendiquer les attentats de Madrid (2004) et Barcelone-Cambrils (2017).
J’accuse donc les protagonistes de l’idéologie « islamiquement correcte » qui disent que l’Espagne sous l’Islam était si « merveilleuse » de faire le jeu des djihadistes. Ce mythe d’Al-Andalous, prépare tout bonnement l’islamisation conquête de l’Europe que veulent tous les adeptes du Califat, jihadistes ou institutionnels.
Europe Israël : Votre dernier livre semble bien se vendre. Pensez vous que les Français sont en train d’ouvrir les yeux sur le fascisme islamique ?
Alexandre Del Valle : J’ai l’impression effectivement que les Français commencent à prendre conscience du danger que représente le totalitarisme islamiste, mais avec des nuances parce que, je risque peut-être de choquer, mais le fait d’ouvrir les yeux est bien mais pas du toit suffisant. Face au fascisme, au totalitaires, aux prédateurs suprémacistes, aux conquérants, ouvrir les yeux ne sert à rien, il faut plutôt fermer les portes….
Europe Israël : Etes vous d’accord avec cette formule « fascisme islamique » ?
Alexandre Del Valle : Absolument ! Cette formule a été attribuée à tort à Georges Bush, reprise par Manuel Valls et elle serait par conséquent pour certains une phrase de « néo-conservateur pro-israélien », or elle vient d’un communiste algérien qui n’est pas du tout pro-israélien et qui s’appelle Rachid Boudjedra ! Elle a été créée et reprise par des intellectuels algériens progressistes, puis d’autres penseurs arabes ni sionistes ni pro-américains, et même par des nationalismes arabes. J’ai repris cette formule de grands intellectuels arabes bien avant que Bush ou Valls ne l’utilisent. Le fascisme islamique c’est la façon dont les progressistes arabes combattent l’islamisme en le qualifiant parfois même de de nazisme. Je pense d’ailleurs que le terme le plus adéquat n’est pas islamo-fascisme mais islamo-nazisme, car l’islamisme a beaucoup plus été inspiré par la violence et l’antisémitisme fanatiques du nazisme que par le système fascisant étatiste mais moins totalitaire.
Les Frères Musulmans avaient en effet une très grande proximité avec la parti national socialiste allemand dont un bureau était basé au Caire, ainsi qu’avec le IIIème Reich en général : tout le monde connait désormais le Grand Mufti de Jérusalem leader pro-nazi et conseiller d’Hitler et ancêtre du Hamas et du panislamisme en même temps que du palestinisme négationniste, moins connaissent François Genoux, le banquier du II ème Reich qui a financé la cause arabe et islamique avec l’argent nazi suisse après la seconde guerre mondiale. Encore moins connue mais plus déterminante encore a été l’influence idéologique brune-verte de l’un des grands cadres du IIIème Reich, Johannes Von Leers qui fût le bras droit de Goebbels pour la propagande antisémite en Allemagne, et qui trouva refuge (comme nombre de dignitaires et agitateurs nazis) en Egypte après la mort d’Hitler et la chute du Reich. Avec tant d’autres nazis allemands et européens émigrés dans le monde arabe pour continuer la « lutte contre les juifs », devenus « israéliens » avec la création de l’Etat d’Israël en 1948, il a embrassé à la fois la cause arabe palestinienne et l’islamisme totalitaire, en se convertissant à l’Islam, en se rapprochant même un temps des Frères Musulmans, se faisant appeler Omar Amin, et en devenant l’un des responsables de la propagande anti-juive pour le régime égyptien nationaliste de Nasser qui l’utilisa notamment pour diffuser les œuvres nazies et révisionnistes dans les média