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Alexandre del Valle : La France a-t-elle agi par réalisme ou pêché par naïveté en recevant à Paris « l’égorgeur modéré » Joulani ?

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    AdV
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CHRONIQUE. L'invitation à Paris, le 7 mai dernier, d'Ahmed al-Charaà, alias Al-Joulani, l’ex-jihadiste président syrien autoproclamé qui a renversé Bachar al-Assad à Damas le 8 décembre dernier, a suscité un débat intense. Au-delà des polémiques, Alexandre del Valle analyse les raisons, bonnes ou mauvaises, de l’initiative présidentielle.





Les arguments en faveur de l’invitation sont réels : premièrement, la France encourage une transition vers une Syrie stabilisée. Pour Paris, le nouveau régime est incontournable car la Syrie, ancien mandat français de la SDN, est stratégique : frontalière de la Turquie, du Liban, d’Israël, de l’Irak et de la Jordanie, elle abrite (surtout en zone kurde) des jihadistes français à surveiller et qu’il faudra juger, en plus de ceux qui gravitent autour de Joulani à Idlib. Emmanuel Macron a par ailleurs relancé une géopolitique arabe qui passe par le Maroc, l’Égypte, la Jordanie, le Golfe et même la possible reconnaissance de l’État palestinien. Face aux critiques, il a insisté sur l’absence de « complaisance » envers les mouvements extrémistes et a demandé des garanties concrètes sur la protection des civils et des minorités qui subissent des exactions depuis l’arrivée d’Al-Charaà.


Ce dernier a ainsi exprimé son intention de dissoudre les factions armées, y compris Hayat Tahrir al-Cham (HTS, ex-Nosra, Al-Qaida en Syrie), puis de convoquer un dialogue national en vue d’élections d’ici quatre ans. La France envisage dans ce contexte un assouplissement de certaines sanctions mais considère qu’il est encore trop tôt pour lever les sanctions onusiennes visant Al-Charaà/Joulani et HTS Rappelons que la dernière rencontre d’un président français avec un homologue syrien remonte à 17 ans, lorsque Bachar al-Assad avait été invité par Nicolas Sarkozy aux cérémonies de la fête nationale du 14 juillet. La visite de Joulani officialise la réouverture des relations franco-syriennes interrompues en 2012.


La rencontre avec al-Sharaà s’inscrit donc dans une stratégie plus pragmatique que naïve.

La rupture totale avec Assad avait d’ailleurs coûté cher aux Français, car si Paris était resté en contact avec les autorités de Damas, les informations du régime syrien sur les camps terroristes francophones en Syrie auraient permis de faire éliminer des jihadistes avant qu’ils ne passent à l’acte au Bataclan et ailleurs. François Hollande en fit d’ailleurs exécuter des dizaines en Syrie après la catastrophe parisienne.


Bien que des terroristes français soient toujours présents à Idlib, fief de Joulani, lequel a octroyé la nationalité syrienne à nombre de jihadistes étrangers, la rencontre avec al-Sharaà s’inscrit donc dans une stratégie plus pragmatique que naïve. Mais si le gouvernement syrien « de transition » prétend être inclusif puisqu’il inclut une femme chrétienne, un ministre druze, un kurde, et même un alaouite, les postes régaliens (défense, intérieur, renseignement) demeurent monopolisés par le HTS de Joulani-Al-Charaà).


Les arguments contre l’invitation sont donc aussi recevables : Ahmed al-Charaà/Joulani a été un membre actif d’Al-Qaïda après avoir été – aux côtés de Zarqaoui et d’al-Baghdadi, l’un des dirigeants de Daech – puis il a dirigé Al-Nosra (Al-Qaïda en Syrie) et le HTS, qui en est issu avant de « relooker » son mouvement sous conseil du Qatar, de la Turquie et des Occidentaux, ses principaux appuis. Son passé jihadiste permet de douter de la sincérité. Des rapports des services de renseignement égyptiens et émiratis indiquent...



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