SOS repas de fête : 10 choses intelligentes à rétorquer sur les sujets qui risquent de semer la ziza
Programme libéral de François Fillon, attaques de l'Etat Islamique en Europe, premiers pas de Donald Trump ou état de l'économie française : les fêtes de fin d'année impliquent certes des retrouvailles agréables, mais également certaines discussions enflammées. Petit florilège d'éléments indispensables pour recadrer les débats si besoin.

Sur l'Etat Islamique : "ils nous attaquent car la France intervient militairement en Syrie"
Alexandre del Valle : L'attentat de Berlin nous apprend que les terroristes ne nous détestent pas pour ce que nous faisons de mal ou de bien (le colonialisme, les bombardements en Syrie ou en Irak) mais pour ce que nous sommes. Nous avons affaire à un totalitarisme chariatique qui veut répandre sa vision totalitaire et théocratique de l'islam dans le monde entier. Leur stratégie de la tension et de la terreur repose sur un terrorisme psychologique qui vise à terrifier des populations en attirant les médias pour faire parler d'eux.
Leur but est de tuer un Occidental parce qu'il est occidental, peu importent ses origines. Personne n'est pardonné, pas même un régime pro-immigrés comme l'Allemagne qui a accueilli de nombreux réfugiés, dont des islamistes.
Dans les années 2000, certains considéraient qu'Israël était la source du djihadisme et que si l'Occident avait défendu les Palestiniens, n'avait pas aidé les Israéliens et ne s'était pas engagé dans la guerre d'Irak, il aurait été épargné. L'attentat de Berlin invalide cette idée puisque l'Allemagne n'est pas dans une optique interventionniste, elle ne participe pas à des guerres à l'étranger contre des pays musulmans, elle accueille des islamistes sur son sol et elle est victime d'attentats.
Que l'on soit pro-israélien ou anti-israélien, pro-américain ou anti-américain, un pays colonial ou pas, islamophobe ou islamophile, nous sommes, aux yeux des islamistes, des Européens mécréants considérés comme des ennemis. C'est notre nature même de mécréant qui est détestée.
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Sur François Fillon : "c'est un candidat ultralibéral"
Christophe de Voogd : Le refrain de "l’ultra-libéralisme" est en effet entonné dans tous les médias de gauche et par Manuel Valls lui-même à l’encontre de François Fillon. Notons d’abord la connotation doublement polémique de ce terme dans notre culture politique : "ultra" renvoie aux aristocrates réactionnaires de la Restauration qui, selon le mot de Talleyrand, n’avaient "rien appris, ni rien oublié". Quant à "libéral", on sait qu’il est chez nous l’équivalent de "loi de la jungle" de "droit du plus fort" et d’"anti-social".
François Hollande vient ainsi de tweeter que le "libéralisme, c’est la liberté des uns contre celle des autres". Notre tradition étatiste et égalitariste nous a fait largement oublié que le libéralisme est d’abord une philosophie de la liberté qui a inspiré notamment la Déclaration des droits de l’homme, l’instruction publique et l’émancipation féminine. Autrement dit, personne n’est plus "anti-ultra" que les libéraux ! La dénonciation de "l’ultra-libéralisme" est donc, en même temps qu’une double charge polémique, un double contre-sens historique et idéologique. A quoi s’ajoute que, de Montesquieu à Revel en passant par Tocqueville, Bastiat, Alain et Aron, la France est très riche de cette pensée libérale. Mais nos lycéens et même nos étudiants n’ont pas le droit de le savoir…
De fait, la volonté d’ordre est plus typique de l’horizon politique de la droite conservatrice que de celle du libéralisme qui croit davantage à l’ordre spontané du marché, sous réserve d’une régulation juridique de l’Etat, ce que l’on oublie toujours. Quant au sérieux budgétaire, il n’a rien de libéral en soi : tout dépend des circonstances. Poincaré, Rueff, Barre ou Bérégovoy y croyaient parce qu’ils constataient l’impasse de la gabegie budgétaire. Il est vrai que la chose s’est un peu perdue depuis les années 2000.
Allons plus loin : en bon libéral, je m’interroge sur les motivations de tant commentateurs qui hurlent au loup (c’est-à-dire à "l’ultra-libéralisme") devant le programme de F. Fillon. Et je constate que ces hurlements viennent des innombrables rentiers de l’Etat qui s’inquiètent naturellement de la perspective d’une baisse des dépenses publiques et défendent non moins naturellement leurs intérêts : fonctionnaires, syndicats, classe politique, audiovisuel public et une bonne partie de la presse…Pour certains, comme Libération, c’est une question de survie : on comprend leur violence anti-Fillon. Cette hostilité de "l’establishment d’Etat" va rendre la tâche très difficile à ce dernier, dès cette semaine et plus encore lors de la campagne présidentielle, s’il franchit les primaires.
Mathieu Mucherie : La droite française depuis plus de 20 ans est beaucoup plus à gauche et antilibérale que les droites classiques européennes, et même que certaines gauches sociales-démocrates (Blair et même Schröder plus libéraux que Chirac, etc.). Et dans ce contexte franchouillard, oui, Fillon est libéral. Mais le fait que Gorbatchev était plus libéral que Brejnev et beaucoup plus libéral que Staline n’en faisait pas pour autant un authentique libéral. C’est l’histoire du borgne aux pays des aveugles : Fillon est un poil plus libéral que l’archétype des énarques (Juppé), que l’idéal-type des énarques (Le Maire) et que le prince des interventionnistes (Sarkozy). Mais il ne faut pas avoir peur du ridicule pour le comparer à Margareth Thatcher. Cette dernière avait un programme, des troupes, du courage. On est aussi assez loin de Jacques Rueff.
A moins que Fillon nous étonne sur le tard, c’est plus un "budgétariste" et éventuellement un réformateur qu’un libéral. Il est plus proche de Juppé que de Madelin (regardez sur son site internet le chapitre "créer des géants européens du numérique", par exemple, on est bien loin de la Sillicon Valley, idem sur la culture, le logement, l’agriculture, etc.). Ce sera un bon administrateur, il a un track record de cinq ans en la matière, pas un libéral, là il n’y a guère que la privatisation de France Telecom à son actif. Mais dans l’opinion cela suffira peut-être : après cinq années de hollandisme, n’importe quelle présidence même centriste apparaîtra comme très libérale.
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Sur Manuel Valls : "il va gagner la primaire et rassemblera la gauche pour la présidentielle"
http://www.atlantico.fr/decryptage/dans-vraie-tete-francais-pourquoi-francois-fillon-est-pas-candidat-qu-on-decrit-dans-medias-emmanuel-riviere-laurent-chalard-2904525.html#fpL3hZM1u6HvMA7c.99Il est manifeste que l’ancien Premier ministre, après avoir tactiquement très bien joué pour bloquer François Hollande en position de "PAT" sur l’échiquier politique, n’est pas du tout à son avantage dans cette nouvelle partie, celle qui consiste à emporter la bataille des primaires de la gauche gouvernementale. Disons-le clairement : Manuel Valls est à la peine. Son entrée en campagne n’a absolument pas provoqué une adhésion massive. Il n’y a pas eu plus d’électrochoc que "d’effet de blast" (pour employer un vocabulaire à la Sarko auquel ne répugne pas le "communicant" Valls) qui aurait suivi l’annonce de sa candidature. Pire que cela, on voit que le "TSV" (Tout Sauf Valls) a plutôt le vent en poupe. Peut-être, compte tenu de la "jurisprudence Juppé" est-ce la meilleure chose qui peut s’offrir à Manuel Valls : surtout ne pas apparaître comme le favori, être donné battu, etc. Certes le "modèle Fillon" crée des désirs de couleurs camouflées, d’imperméable passe-murailles et de veste matelassée bleu-nuit pour éviter d’être repéré par la patrouille des sondages… Mais quand même : Nicolas Sarkozy ne faisait pas la course en tête dans la primaire de la droite, il a quand même bien été victime d’un TSS (Tout Sauf Sarkozy) aussi scandaleux au niveau de la règle du jeu politique que redoutablement efficace pour l’éjecter sans hésitations ni murmures du second tour de la primaire. Donc Manuel Valls peut se "gauchir" (lamentable épisode que celui sur le 49.3 jusqu’à aller dire que cet article de la Constitution n’est pas démocratique… pour complaire aux démagogues et aux gauchistes incultes…) tout ce qu’il peut, il aura bien du mal à résister aux tirs en rafales du TSV. Seule une faible participation peut vraiment jouer en sa faveur. Autrement dit, un corps électoral se déplaçant à la primaire de fin janvier plutôt en phase avec les 50 000 adhérents à jour de leur cotisation (voilà où en est le PS aujourd’hui en nombre de militants), quantitativement limité et circonscrit au périmètre adhérent serait la meilleure chose pour lui. Si la gauche de la gauche se mobilise pour intervenir dans la primaire de la Belle Alliance Populaire, Manuel Valls sera irrémédiablement condamné, peut-être même, tout comme Sarkozy l’a été, dès le premier tour.
Sur Donald Trump : "son électorat ne lui pardonnera pas d'être revenu sur plusieurs promesses de campagne"
Jean-Eric Branaa : Les premiers temps qui suivent l’élection sont effectivement très importants aux yeux des électeurs de manière générale et encore plus cette fois-ci, aux yeux des électeurs de Donald Trump, pour qui les attentes sont très grandes : il a suffisamment été relevé par la plupart des commentateurs que l’Amérique qui a porté le candidat républicain au pouvoir a été motivée par une profonde colère, voire une désespérance. Les discours assurant qu’il allait "nettoyer le bourbier", en visant les élites de Washington, ont donc fait naitre l’espoir que cet homme-là serait enfin un homme de pouvoir très différent, qui ne ferait aucun compromis avec les lobbies, les groupes politiques ou les intérêts divers et variés. On ne peut donc qu’être surpris de l’entendre exprimer ses premiers renoncements en matière de promesses de campagne.
La réalité est bien plus complexe et simple à la fois : Donald Trump, qui n’a aucune expérience politique, n’a aucune idée claire du monde dans lequel il vient d’entrer. Sa conception est une vision romantique du pouvoir dans laquelle il s’imagine dans le rôle de celui qui est au-dessus de la mêlée. Maintenant qu’il a été élu, il se voit un peu comme un roi qui doit protéger ses sujets. Ses premiers mots on donc été aimables et rassurants pour tous, ses supporters comme ses opposants. Ainsi, après avoir tweeté rageusement contre les manifestants qui se massent devant sa tour Trump, à New York, il a ensuite insisté dans un autre tweet sur leurs passions communes pour l’Amérique. Avec Barack Obama, il a mis de côté toutes ses accusations, insultes et attaques qu’il a pourtant multipliés pendant la campagne, pour signifier que c’était un grand homme, et "très classe". Même chose à l’égard de Bill Clinton, puis d’Hillary, la concurrente battue, "incompétente et corrompue" la veille et qui devient "forte et intelligente." D’ailleurs, pour tout dire, le couple Clinton est "charmant", à ses yeux, désormais.
Et, surtout, Donald Trump découvre les dossiers un à un. C’est désormais très différent de ce qu’il a l’habitude de faire et il lui faut trouver sa place. Pour autant, il ne changera pas sa nature profonde : c’est un intuitif et un impulsif. Or, son sentiment est qu’il faut, là aussi, composer pour donner un peu de part du gâteau à tous, même à ceux qui ne l’ont pas soutenu. Sur ses thématiques fortes, même si la moindre variation est observée, il n’hésite donc pas à indiquer qu’il conservera du plan de son prédécesseur les deux mesures les plus populaires de l’Obamacare. C’est une vraie rupture avec sa promesse de campagne de faire table rase de l’existant pour le remplacer par quelque chose de "bien plus efficace et pour moins cher". On peut considérer pourtant que son électorat ayant davantage voté pour une promesse générale de changement, une attitude et une démarche plutôt que des mesures précises, il peut se le permettre.
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Sur le programme socio-économique de François Fillon : "il est trop brutal pour pouvoir séduire les classes populaires"
Laurent Chalard : Les résultats des dernières consultations électorales dans plusieurs pays développés (Brexit, Donald Trump…) montrent qu'aujourd'hui la question économique n'est plus la question primordiale pour les classes populaires. C'est désormais la question identitaire, en particulier la question de l'immigration. Le premier élément qui détermine que les gens choisissent un candidat plus qu'un autre, c'est la position de ce candidat vis-à-vis de l'immigration. Les classes populaires sont plutôt hostiles à l'immigration, donc le candidat tenant le discours le plus ferme sur cette question migratoire est celui qui a le plus de chances de récupérer la majorité de leurs suffrages.
On l'a constaté de façon assez impressionnante aux Etats-Unis avec le vote Donald Trump et à travers les réactions post-électorales : ceux qui ont voté pour Donald Trump sont ceux qui ont voté avant tout contre l'immigration. C'est exactement la même chose pour le Brexit : on a très bien vu que le moteur principal du vote pour le Brexit n'était pas du tout la question économique ou le fait que le Royaume-Uni serait dupé par l'Union européenne, mais bien l'incapacité de l'UE à gérer la crise des migrants.
Une fois dit cela, au niveau du vote sur la question économique, il y a eu un certain basculement puisque traditionnellement les classes populaires étaient majoritairement favorables