G20 sous influence : cet effet Trump global qui déferle sur la planète
Sur de nombreux dossiers clés, la perspective du retour de Donald Trump à la Maison Blanche dans deux mois risque de changer pas mal de choses.
Ces éléments, et l’élection de Trump, pourraient être le facteur de bascule vers un monde moins prévisible dans lequel les réactions ne sont plus normées.
C’est ce basculement que pourrait provoquer Trump à la maison-Blanche et tout le monde a intérêt à s’y préparer. Il ne faudra pas être le dernier à entrer en négociation avec les US.
Alexandre Del Valle : L’arrivée au pouvoir de Donald Trump, qui a déjà effectué des nominations qui annoncent une administration très spéciale, presque révolutionnaire par rapport à l'establishment américain traditionnel, aura un impact direct sur l’ambiance du G20. Beaucoup plus hétérogène et divisé que le G7, il regroupe des économies très différentes, certaines alignées avec les États-Unis, d'autres plus proches de la Russie.*
L’ombre de Trump plane sur ce sommet dans la mesure où il devrait revenir à une politique plus ou moins « America First », voire isolationniste. Il faudra s'attendre à un retour du cynisme et de la realpolitik, avec un affaiblissement du multilatéralisme, du droit international et des grands accords mondiaux au profit de deals bilatéraux.
Trump étant climato-sceptique, on peut difficilement imaginer que le G20 puisse avancer sur les questions environnementales, alors même que la COP29 approche. Les pays du Sud considèrent comme une injustice qu'ils soient censés freiner leur industrialisation pour des raisons écologiques, alors que les pays occidentaux ont largement pillé la planète lorsqu'ils étaient en pleine expansion économique. Le retour au nationalisme et à l'isolationnisme prôné par Trump va rendre encore plus difficile la coopération sur ces sujets au niveau international.
Dans ce contexte, le multilatéralisme, qu'il soit porté par l'ONU ou le G20, deviendra de plus en plus difficile à faire valoir. Le G20 lui-même, déjà très fragmenté avec des intérêts trop divergents, sera un terrain moins propice à des compromis globaux. De plus, les pays du Sud pourraient se servir de l'arrivée imminente de Trump au pouvoir comme d’un prétexte pour ne pas s'engager sur des sujets qu'ils jugent irréalisables, en utilisant son retour pour justifier un repli sur leurs propres intérêts nationaux. Cela pourrait affaiblir encore davantage l’élan multilatéral, déjà en déclin, et encourager une politique davantage axée sur les intérêts nationaux plutôt que sur la coopération internationale.
Comment les dirigeants du G20 se préparent-ils à l'avènement de Donald Trump à la Maison Blanche ? Quel impact potentiel sur les alliances, sur les pôles économiques, sur la mondialisation de façon générale ?
Alexandre Del Valle : Le monde se prépare à l'arrivée de Trump avec un certain soulagement. Bien sûr, en Europe de l’Ouest – libérale, démocratique, atlantiste, politiquement correcte et prospère – il y a une véritable inquiétude. Les leaders européens redoutent que Trump ne leur impose des surtaxes, qu'il abandonne l'OTAN, ou qu’il fasse des concessions territoriales à la Russie concernant l’Ukraine, pour ne citer que quelques scénarios. Le Japon, la Corée du Sud et Taïwan sont également préoccupés par un possible désengagement américain de la région.
Mais pour le reste du monde, Trump peut représenter une opportunité. Par exemple, les Chinois voient en lui un homme d’affaires pragmatique. Ils savent qu'avec Trump, il suffira de négocier des accords, car il est beaucoup moins attaché aux principes moraux ou aux accords multilatéraux. Pour lui, l’essentiel est de conclure des affaires, et il pourrait être prêt à faire des concessions sur des questions sensibles, comme Taïwan, tant que cela n’implique pas directement les États-Unis.
Du côté de la Russie, Trump est perçu comme un interlocuteur favorable. Même si Vladimir Poutine n'a pas assisté au sommet du G20, la Russie fait toujours partie de l’organisation, et l’arrivée de Trump pourrait être une opportunité pour Moscou. D’autres pays, comme l’Inde sous la direction de Modi, un ultranationaliste, préfèrent également Trump à Biden. Les nations d'Asie du Sud-Est voient également en lui un allié potentiel, notamment en raison de sa posture anti-chinoise. En Amérique latine, même les gouvernements de gauche, comme celui de Lula au Brésil, pourraient trouver un terrain d'entente avec Trump, car son discours nationaliste et protectionniste résonne avec leurs propres priorités. En somme, tous les nationalistes, qu’ils soient de gauche ou de droite voient en Trump une figure qui partage leur vision.
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